Ce « portrait de père » prend les traits d’un fils, et la filiation offre un tronc solide à l’avenir. Un texte plein de tendresse de Florian Galinat.
À mon fils,
L’été 2009, Sur la route de Kharkhorin j’ai fait la connaissance de ton prénom. Je le lisais, il me parlait. Durant ces longues conversations j’ai effeuillé une bonne partie de sa vie. À l’ombre du jour face au crépitement du sable dans le feu du désert. À la lumière d’une nuit dans le train sur la voie lactée. Ton prénom a continué le voyage avec moi jusqu’à Beijing puis j’ai tourné la page.
On s’est revus non loin d’ici dans un village. Il avait changé, s’était francisé. Il claudiquait appuyé sur sa lettre majuscule en bois. J’ai su lorsqu’il s’est présenté, armé de son sourire, qu’un jour il partagerait ma vie.
Ton prénom est revenu de nombreuses fois me voir. Il restait dormir, parfois des mois, dans une chambre que je lui réservais. Pleine de couvertures et de fiches. Je restais près de lui. Je soulignais les nombreux traits de ses caractères. Nous reprenions nos longues conversations.
Puis j’ai marché sur un vieux chemin d’écolier pour le retrouver. À travers un champ d’étoiles. Je me suis approché de lui sans le voir. Une montagne nous séparait. Je reviendrai et on se baignera dans le couchant à Finisterre.
J’ai regretté de ne l’avoir jamais connu lorsqu’il était grand-père. Ton prénom fut instituteur. J’ai connu sa femme, un petit bouquet coloré d’amour. Il a quitté avec classe l’école de la vie. Je suis arrivé juste après dans cette cour de récréation presque vide. Il ne restait que sa petite-fille qui jouait sous la jupe de l’arbre. Il me confiait ta maman.
Ton prénom est venu près de toi pour te faire traverser le pays de Toï et de Cao. Tu nous tenais la main et nous l’ignorions. Notre retour fut un nouveau départ.
Pour ne pas l’oublier, nous te l’avons donné.
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