V. Pietri, R. Sabounti, M. Mene et E. Ferroni-Cordeiro - Stupeur et Tremblements

  

Panique sur Corte : mais qui fait donc trembler la terre ainsi ? Une nouvelle peu rassurante de Valentin Pietri, Réda Sabounti, Maxime Mene et Enzo Ferroni-Cordeiro

 

 

Stupeur et Tremblements

 

An 2036. jour 86. 6h45. Corte. Le réveil sonne une première fois, il m’avertit que la nuit est terminée. Il sonne une seconde fois, je m’assois sur mon lit face à l’œil et je tends mes deux bras. Il sonne une troisième fois, la voix robotique se fait entendre :

- Authentification réussie.

L’œil sonne au rayon laser infrarouge la puce dans ma rétine.

- Autorisation de sortie approuvée à partir de 7h 35.

- Bonne journée ID2515V.

La radio s’allume sur la seule station possible. Comme d’habitude, les informations ne concernent que la guerre, la faim et d’autres informations dont le monde se fout.

- Ouverture de la porte.

J’attends l’aérobus, je ne suis pas le seul. Je salue mes camarades d’une inclinaison de la tête, mais ils ne me le rendent pas.

- On va dire que je ne suis pas le plus aimé à l’école.

Le bus arrive enfin après ce moment de gêne, les gens scannent leurs rétines pour prendre place.

Je m’installe et commence à regarder les différentes affiches dans la ruelle. La plupart représentent une quantité affolante de pubs, mais aussi des portraits des dernières personnes qui n’ont pas voulu respecter les règles… comme pour nous donner l’exemple. L’horloge du bus indique huit heures quatorze.

SOUDAIN le conducteur de l’aérobus donne un violent coup de volant et un grand fracas retentit, le bus dévale une pente qui est apparue parmi les entrailles de la terre. La panique est telle dans le bus qu’on ne peut la décrire Au bout de l’énième tonneau, je perds connaissance comme la plupart de mes camarades.

La Terre se mit à gronder à huit heures quinze, à dix-huit heures dix-sept tous les habitants de Corte l’avaient ressenti sous leurs pieds, dans les murs, dans le sol. Les allées branlaient de travers, les voitures volantes tombaient comme une pluie battante.

À dix-huit heures vingt, ce qui était une paisible ville futuriste se mua en un énorme n’importe quoi.

L’onde de choc arrive de l’Est, c’est-à-dire du côté de la Restonica qui n’était presque plus que de la terre sèche bordée de quelques poissons encore vivants, à bouts de forces, puis elle continua sa course vers la nouvelle église installée il y a quelques mois, qui était devenue la fierté de la ville ; mais ses nouvelles fondations et son côté droit s’affaissèrent, suivies de près par la cloche.

Cette chute brutale causa un son discordant qui s’éteignit mollement, événement finalement plus horrible qu’un franc avertissement.

La catastrophe souterraine se répandit en spasmes, rythmée par les cris des malheureux habitants qui couraient dans tous les sens se bousculant et se tamponnant. Telle une gigantesque taupe, le terrible tremblement détruisait tout sur son passage en n’y laissant rien.

La panique était plus frappante encore sous le soleil couchant qui rougeoyait de chaleur. De loin, la ville aurait pu sembler belle, si ce n’était le fourmillement exacerbé et la pagaille totale qui y régnaient. Les paisibles habitants complètement désemparés s’étaient mués en meurtriers fouleurs d’estomacs, en horribles compresseurs de cages thoraciques, en improbables, mais sanguinolents piétineurs de vieillards et d’orphelins. Tous, hommes, femmes, enfants, chiens perdus et chats errants fuyaient hors de la ville en un seul jet continu, doublant d’un raz-de-marée humain le tremblement de terre.

En définitive, la panique fit ce jour-là plus de dégâts que le tremblement de terre lui-même.

Pendant ce temps, bien plus haut au-dessus de la petite ville en ruine, encore plus haut que l’atmosphère terrestre, un étrange vaisseau grisâtre équipé d’un rayon laser de grande puissance observe les ravages causés dans Corte. Deux êtres bleutés d’espèce inconnue gesticulent devant l’écran central en modulant des sons semblables à des pépiements d’oiseaux.

Ils ont cinq paires de tentacules et s’en servent pour porter à ce qu’on pourrait appeler leurs becs de petites bestioles qui couinent, contenues dans un grand bol transparent.

- On s’en refait un ? dit l’une de ces créatures.

- Volontiers, répond l’autre en croquant une autre petite bête.

  

  

Corte au temps des hordes

En attendant le second tome du roman d’Anouk Langaney qui arrivera bientôt (Le Temps des hordes – Soupçons), les élèves de troisième du Collège Pasquale Paoli de Corte se sont mis au travail. Ils ont imaginé, chacun de leur côté ou en petits groupes, leur propre suite en répondant à ces questions : « À quoi ressemblera ton lieu de vie en 2036… quelle catastrophe pourrait s’y produire ? Comment t’en sortir (avec le super-pouvoir de ton choix !?). À toi d’écrire ». 

22 nouvelles ont été écrites dans le cadre du projet littéraire Corte au temps des hordes, dont celle-ci, par des élèves de la 3e Jaune.

Avec la complicité de Stéphanie Fede Vincensini et d’Anouk Langaney.

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