Confinée mais heureuse - Émilie Perreard

Dans son journal de bord, Émilie Perreard, passée par l’épreuve de la maladie, retrouve le chemin des bonheurs simples…

  

  

Confinée mais heureuse

   

Nous sommes samedi 14 mars, jour un du « semi-confinement ».  Je dis semi-confinement car même si on a encore le droit de sortir, on ne sait plus vraiment où aller. Les clubs de sports, salles de spectacle et écoles sont fermées. Ce n’est pas encore le cas des restaurants et magasins mais on n’a plus trop envie de risquer la proximité avec les autres. Enfin surtout depuis le discours de Macron. Angoissant, stressant… C’était jeudi… on a pris la mesure, à ce moment-là, de la gravité de la situation… Donc aujourd’hui, samedi 14 mars, pas de cours de sport pour les enfants, aucun déjeuner entre amis, ni shopping, ni sortie ciné programmés. Ce matin donc, au petit-déjeuner, je me suis demandée, non sans une pointe d’angoisse, comment nous pourrions occuper cette journée, d’habitude tant attendue… J’ai ainsi timidement proposé, feignant (mal) l’enthousiasme, à notre petite tablée : et si nous allions nous balader à pied jusqu’au centre équestre du Bois plaisant ? Aucune réponse… disons aucune réponse verbale car les expressions de visage et autres haussements d’épaules m’ont éclairée tout autant. Aujourd’hui, alors qu’on n’a encore probablement plus que deux, trois jours de semi-liberté, je pense aux prochains jours et je me dis qu’ils seront longs …

Le confinement débutera finalement le mardi 17 mars. Je serais un peu vexée que ce soit le jour de mon anniversaire… Mais cela je ne le sais pas encore. Je ne sais pas non plus à ce moment-là que je développerais les premiers symptômes du COVID 19 quelques jours à peine après l’écriture de ces lignes. Je n’imagine pas alors que ce fichu virus toucherait aussi mon mari et mes enfants et nous mettrait littéralement à plat pendant quinze jours. Je ne sais pas encore que cet épisode difficile resserrerait les liens entre nous quatre et que nous ressentirions le besoin quotidien de nous coller sur le canapé pour rire aux éclats devant Friends. Vingt ans que je n’avais pas revu ma série préférée ! Je ne sais pas qu’après notre guérison je serais si fatiguée, que même une marche de vingt minutes m’épuiserait. Je ne sais pas non plus que je deviendrais finalement accro à ces balades solitaires, je rajouterais même mes AirPods et prendrais plaisir à écouter des podcasts de Christophe André à la voix si chaude. Je ne me doute pas alors que cela me donnerait envie de méditer moi-même et que j’initierais mes enfants. Je ne sais pas ce samedi 14 mars que j’apprécierais autant ma maison, mon jardin, le simple fait de ne rien faire, ne rien prévoir, ne rien choisir ; le fait de n’avoir aucune sollicitation extérieure et d’apprécier cela. Je ne sais pas encore que je trouverais même les journées trop courtes, que je me lancerais dans l’écriture, les massages, que je redécouvrirais la joie simple d’un bain chaud, que j’interpréterais des belles-mères cruelles dans des spectacles écrits par mes enfants.  Je ne sais pas encore que ce confinement serait une parenthèse enchantée, une ode au moment présent.

  

  

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