Nathalie Bompart Patchine - Nocturne

Nathalie Bompart Patchine nous conte l’histoire d’un baiser tourbillonnant dans l’espace et le temps, d’un amour rêvé, d’un instant de printemps… 

 

 

 Nocturne

 

  

Il m’en a fallu du temps pour être prête à entrer sur les mille chemins inventés que vous m’avez ouverts.

Avec élégance votre main dans la mienne, vous m’avez enseigné le porté en danse, son lâcher-prise et la confiance en son étoile. 

Je vous ai suivi sans même vous connaître, avec cette sensation de vous avoir toujours connu. 

J’ai aimé composer avec vous jusqu’à rencontrer ma lumière et effleurer la vôtre.

Vous m’avez offert avec gentillesse ce partage en cadeau et mon chemin s’est à nouveau éclairé.

Je n’attendais rien de vous, même si j’espérais tout, et j’ai traversé ainsi à vos côtés bien des saisons… celles qui m’ont fait connaître le rythme de l’attente, du plaisir, de la patience et de la révérence. 

Tous les mots que j’ai cueillis au long de nos balades inattendues, je les ai ramenés chez moi avec ces pommes de pin, ces petites plumes blanches, ces cailloux dorés en forme de cœur trouvés dans les fossés et j’en ai fait des bouquets.

J’ai tellement écrit sur la beauté de notre rencontre que j’en ai souvent oublié de dormir et de manger.

J’ai appris, sans douleur, à vous attendre le jour, la nuit, à me rassasier des miettes que vous me déposiez et même à vous entendre jusque dans vos silences.

Je ne craignais même plus d’affronter ce cavalier noir qu’il m’arrivait de rencontrer parfois dans mes nuits blanches.

J’étais prête à lui faire face… Prête à lui lancer aux yeux, quand nos regards se croiseraient, cette poignée d’amour fou, enfermée dans mes mains, depuis que je ne vous écris plus.

Besoin de marcher…

Je sors et c’est avec ce souffle de vous que j’aime m’aventurer seule dans la forêt. C’est là que je ressens nos deux âmes s’abandonner et infuser leurs parfums secrets, chanter nos attraits et fleurir mon amour sur une allée infinie.

J’ai laissé s’envoler mon regard sur le ciel, sur le soleil, sur les arbres et sur l’enfant qui m’accompagne et dont je ne lâche jamais la main.

Je n’étais pas seule, je ne suis jamais seule… même quand je semble l’être.

Et puis, sans m’y attendre… J’ai trouvé un baiser par terre…

Il avait la forme et la couleur de ce baiser que je n’ai pas osé vous prendre le jour où vous vouliez me le donner…

Je l’ai ramassé et déposé délicatement sur mes lèvres…

Il avait la saveur d’un voyage sans retour, d’un amour dans son impossible combat… un goût de lait et de lumière, l’arôme de votre thé parfumé d’un nuage de mélancolie. 

Ce baiser qui dansait sur ma bouche m’emplissait d’une joie enfantine… Je redevenais vivante.

L’encre, avec légèreté, s’est remise à couler… infiltrant ma peau pour atteindre mes mains excitées à l’idée de reprendre pour vous la plume.

Joyeuse, je suis rentrée pour vous écrire des mots aussi sucrés que ces fruits défendus… sensuelle est alors devenue mon inspiration, se noyant dans le courant de mes émotions, dans la candeur de mon âme et la fraîcheur de mon encre.

Je me suis taché les doigts à dessiner le contour de nos rêves, pour laisser vos yeux en deviner le jeu.

Le cavalier noir n’est pas venu… c’est vous qui recevrez cette poignée d’amour fou…

Quand je me suis couchée, j’ai déposé le baiser trouvé sur mon oreiller, il ressemblait à une feuille… 

En m’endormant, j’avais ce sourire que seuls les enfants savent encore porter… seule l’enfance est un parfum de grâce, seule l’enfance a ce parfum de grâce…

Cette nuit-là, j’ai rêvé que vous laissiez mes lettres se coller sur votre nudité, que vous ôtiez ma robe de papier aux écrits interdits, que vos mains s’amusaient en jouant ce prélude avant de goûter au plaisir des partitions qui constellaient ma peau.

Aucun rêve n’est étrange, ce rêve fut une rêve-olution ! une rêve-lation ! 

J’aime l’énigme que vous êtes. 

C’est dans l’écriture que je revis ce frisson doux et sauvage. 

Je n’écrirai que pour vous… sur une page orientée au soleil, pour trouver la lumière dans mes nuits sombres, pour pouvoir toucher l’ombre de votre présence, pour dessiner une porte dans votre mur et puis l’ouvrir… c’est ma façon de vous rejoindre.  

J’ai longtemps craint vos silences, votre absence. 

Un jour peut-être vous disparaîtrez.

Je continuerai à parler avec votre existence… parler c’est aussi aimer.

Jamais je ne perdrai la lumière donnée, ce sera ma façon de me soigner.

 

  

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