Édito de juillet 2022

 

La langue écrite a ceci de grandiose, qu’une seule lettre – présente ou absente, parfois même inaudible – est capable de modifier  radicalement le sens originel. 

Si l’on a oublié d’écrire l’édito (celui de juillet), ce n’est pas un effet « vacances », mais plutôt un état de « vacance ». 

Je ne suis pas le seul à en être là. C’est manifeste. Il suffit de scruter quelques minutes la masse des « en vacances » : l’esprit semble avoir déserté les lieux. Je pense à Roland Gori et son Un monde sans esprit, et cela fait un peu peur. Mais bien sûr, ce n’est pas parce l’on pense quelque chose que celle-ci existe vraiment. Après tout, qu’est-ce qui me dit que dans la masse, voire toute la masse, il n’y a pas la quintessence de l’esprit humain contemporain ? Son Aboutissement avec un grand A. Comme un achèvement magistral de l’invraisemblable destinée de l’Humanité depuis le singe arboricole mutant à nous, Sapiens sapiens, forme ultime, en short, tongs et bobs, affranchie de tout souci de survie élémentaire et donc de toute nécessité de s’inventer un monde meilleur. Enfin affranchie de la nécessité de se projeter, de créer, de penser… de se ruiner le cerveau. 

Vide et sans idée, j’en suis réduit à jouer avec les mots… voire à m’énerver et pratiquer le cynisme – gratuit – pour raviver des neurones mollassons.

Vide, vacuité, vacance… versus Vacances ! 

Et si la fameuse lettre n’était qu’un leurre et qu’il n’y avait finalement aucune différence entre « vacance » et « vacances » ? Et s’il y avait continuité absolue entre avant les vacances, pendant les vacances et après les vacances, et que ce qui ferait le lien était justement un état de « vacance » généralisé?

Je préfère arrêter là. Et retourner me  caler dans mon fauteuil sous le tilleul, en attendant que cela passe… et faire le vide…

Ou invoquer un droit à la paresse – bien connu chez le singe arboricole –, plutôt que de revendiquer celui à la vacance…

  

 

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