Dominique Gaudin - Itinéraire d’une petite fille de 6 ans

 

Parcours d’enfance : « Suivez la guide ! », un récit de Dominique Gaudin

  

Itinéraire d’une petite fille de 6 ans

 

Bonjour à tous,  

Bienvenue à vous qui vous êtes inscrits pour la visite de notre petite ville ; c’est une visite un peu particulière puisque nous allons  suivre l’itinéraire d’une petite fille qui a 6 ans en 1950 jusqu’au moment où elle quitte la ville en 1956.

Nous nous trouvons Place du 26 décembre, à proximité de l’église du même nom où cette petite fille assistait à la messe de minuit avec toute sa famille. À noter que son père avait milité pour convaincre  Monsieur le curé de présenter une crèche plus moderne et mettre de côté la brebis à 3 pattes, le berger estropié ou le Roi Mage manchot... La crèche de Monsieur le directeur, un voisin du quartier, était attendue par tous les paroissiens : « Mais c’est du Picasso cette année! », étonné ou scandalisé ;  « ça manque de sapinettes", déçue, la vieille dame, entendait-on au dévoilement de l’installation.

Rejoignons le Boulevard de l’Audace et prenons à droite le Pont de Basterou. Au rond-point nous attend sur notre droite la Départementale 242. Remarquez sur votre gauche le Palais d’Aucassin et Nicolette, les héros d’une fable-conte du XIIe siècle. C’est dans cet établissement que votre guide fit ses débuts sur les planches lors d’une fête de son école en 1951... pas peu fière la minette avec ses petits sabots précieusement conservés depuis.

Poursuivons tout droit jusqu’à la Porte de la Capitale et empruntons la rue du même nom pour entrer dans le cœur de ville. Notre petite fille passait très souvent ici pour aller voir une de ses amies au Comptoir des livres, tandis que, un peu plus haut dans la rue, le chemisier de monsieur le directeur tenait boutique.

Par la rue Lakanal, puis celle des Confessions, nous arrivons à la Place des Gars de la Marine, belle place carrée entourée de galeries, architecture typique des Bastides. C’est ici qu’un certain 14 juillet, fut donné un magnifique concert en nocturne, par la musique de la Marine Nationale, après le défilé du matin et avant le feu d’artifice suivi du bal!

Prenons maintenant la Rue des Vieilles filles pour nous arrêter devant la façade  de la Carrière de Briques, que nous ne pourrons pas visiter.

Avez-vous remarqué cette enseigne Au Chat botté ? Impossible de la manquer... saviez-vous que les bottes du chat étaient rouges ?

Empruntons la Rue de Penne, pour prendre ensuite la Rue de Velours et très vite à gauche  le Chemin de Velours ; vous remarquerez l’établissement des Vieilles Filles où la fillette était scolarisée pour les classes de 6e et 5e. Ici se déroulait la kermesse à la veille du départ des vacances d’été. À l’époque c’était vraiment le sous-préfet aux champs !! Pour se rendre à cette institution, chaque matin, monsieur le Directeur embarquait ses deux filles dans une carriole que tractait son vélo. Elles y étaient un peu serrées, drapées dans leur pèlerine et se tenaient chaud par jour de grand froid.

Par la Rue de la Petite musique de nuit, nous arrivons à un lieu incontournable au printemps : celui de L’attraction Citroën, le concours d’élégance automobile, qui faisait fureur dans les années 50, ancêtre des Salons de l’Auto ; concours d’élégance vestimentaire aussi puisque figurants et figurantes mettaient en valeur les modèles automobiles avec un défilé de mannequins !! Il me semble que cette manifestation était organisée par le Rotary club, et la filleule, très Pin-up,  de mon père n’en manquait pas un!

Revenons vers le centre ville par la rue Darfeuille : une pause s’impose dans le Parc des Casoars, antichambre ou salle d’attente des Carabins logés derrière.

Reprenons notre parcours qui, pour sa dernière partie, nous mènera chez Stymphale.

Par la Rue Darfeuille nous arrivons à la Rue des Cieutats qui nous mène au Pont d’Antan. À l’entrée de ce très beau pont, sur votre gauche une chapelle que nous appelions la chapelle des Saints et des Anges. Pourquoi ?

Toujours en référence à la fête de Noël, il y avait là deux anges qui baissaient la tête lorsque l’on introduisait une pièce dans leur nuque.... émerveillement des enfants !

Depuis le pont, vers l’amont vous pouvez voir le Pont du XXe et, plus haut, le complexe olympique (25 mètres !), régulièrement sous les eaux lors des crues du Lot.

A la sortie du Pont, nous prendrons à droite la rue du 26 décembre, nous laisserons sur notre gauche la Rue Précieuse, pour prendre, toujours à gauche, la Venelle Miss Poubelle, nauséabonde à l’époque de la petite fille, et où la Miss en question vivait dans une sorte de bouge infâme, vêtue de haillons, à proximité du dépôt du chiffonnier : c’était d’une puanteur insoutenable !

Cette venelle que votre guide traversait toujours avec appréhension lorsqu’elle allait voir son amie Poucette, débouche sur la Rue de Stymphale, celle qui a fait dire à Madame Elia notre cuisinière « Ah! Monsieur, cette fois on vous a goudronné le derrière !!! » Proverbiale notre Elia.

Nous voici donc au terme de notre parcours, dans le pré de Stymphale, un Anglo-Arabe, robe noire, mascotte de l’établissement national – que dirigeait monsieur le Directeur – sans oublier ses cousins percherons ou bretons et les idiots du Poitou dont les braiments nous surprenaient toujours.

  

  

Ce texte fait partie du compagnonnage mis en place entre Le Nouveau Décaméron 2021 et l’atelier d’écriture Racines de Ciel, animé par l’écrivaine Isabelle Miller, dans le cadre des activités littéraires du festival Racines de Ciel.

Le thème choisi cette année était « Commémorations publiques, souvenirs privés » articulé autour de plusieurs propositions successives.

La quatrième proposition à laquelle le présent texte souscrit était : 

« Palais de mémoire ». Sur le plan d’une ville que vous connaissez bien, rebaptisez les rues, les places, les monuments selon votre géographie intérieure, puis tracez un itinéraire comme pour une visite guidée.   .

  

 

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