Et si nous étions tous morts ? - Delphine Ramos

Delphine Ramos, sidérée, dans un Bastia dépeuplé, se pose une question amusante, certes un peu angoissante, mais pourtant essentielle.

  

  

ET SI NOUS ETIONS TOUS MORTS ?

 

Et si nous étions tous morts ? Ce matin je repensais à ce film avec Nicole Kidman, The Others, c’est un film que j’avais adoré à l’époque où je l’avais vu, et si vous n’êtes pas encore tombé dessus, je vous conseille tout de suite d’arrêter de me lire. Il était sorti quelques temps après Sixième Sens et dans la même veine, il dévoilait une fin quasiment improbable. Pendant tout le film Nicole Kidman vit cloîtrée, « confinée » dans une demeure victorienne avec ses enfants atteints d’une maladie incurable qui les empêche d’être exposés au soleil. Je ne vais pas refaire le script, mais ils expérimentent rencontres et phénomènes étranges. Et le film qui reprend les codes du film d’angoisse, couleur sépia et ambiance anxiogène au possible (personnellement il n’y a rien qui m’effraie autant que l’Exorciste) nous laisse croire que Nicole Kidman et ses enfants sont en proie à des manifestions ésotériques. Que leur maison est hantée. Donc twist final, le spectateur comprend que cette mère a en réalité tué ses enfants et qu’ils sont tous morts, pris au piège et enfermés dans leur manoir. Ce sont eux les esprits, les morts convoqués par des humains que l’on aperçoit à la toute fin du film. Frissons rien que d’y repenser. Donc ce matin, je repensais à ce film, et je me disais que peut-être en réalité ma fille et moi étions tout simplement mortes sans le savoir. Que ce confinement était en fait une variation (oui j’ai piqué le mot) de la mort (une sorte de purgatoire) et que nous étions condamnées à rester enfermées dans notre appartement avec de petites sorties que l’on pouvait s’autoriser soi-même (sous réserve) et ce pour l’éternité. Dans la journée j’ai proposé une excursion poubelle à ma fille. Elle se réjouissait de pouvoir sortir et faute d’imprimante a dessiné une belle attestation agrémentée de cœurs et « bon courage » à destination de nos amis de la Police Nationale. Elle a également précisé que nous sortions jeter nos poubelles (cela ne fait pas partie des mesures autorisées mais bon, il n’y avait pas vraiment de case poubelle). Nous avons dit au revoir au chat, pris du gel hydroalcoolique, pièce d’identité, portable. Première sortie depuis quelque jours, nous étions heureuses, hébétées, presque vertigineuses. Consciente que je pouvais l’effrayer (elle n’a pas vraiment encore 12 ans) mais n’ayant pas eu de conversation avec un adulte autrement que par téléphone, Skype ou Messenger depuis plus de trois semaines, je fais part de ma théorie à ma fille. Elle me répond bien justement que nous n’avons pas mérité une telle mort, et qu’elle ne voit pas pourquoi on nous imposerait de vivre ensemble dans un appartement pour l’éternité. Elle me rassure quoi. Nous jetons les poubelles. Puis nous entendons une voix enfantine venue de nulle part. Elle chante « Petit Papa Noël ». Et je peux vous assurer sur la tête de mon chat que l’anecdote est véridique. Nous cherchons du regard mais ne voyons aucune petite fille. Ni dans la rue, ni à une fenêtre. Nous nous regardons entre rire et inquiétude. Et si finalement j’avais raison, et si nous étions passées de vie à trépas sans bruit comme ça, sans prévenir ? Cette voix semblait vraiment venir d’outre-tombe. Je dis à ma fille que vu que nous sommes dehors, nous devrions nous promener un peu sur le Vieux Port, cela ne nous ferait pas de mal de nous dégourdir les jambes. Elle me fait remarquer très justement que notre attestation précise que nous sortons les poubelles. Soupir de ma part. Elle propose le fait que nous restions toujours à proximité de poubelles, containers, détritus, plus facile pour justifier la sortie et pas si compliqué dans le secteur. Ma fille est un génie. La balade s’annonce vivifiante. Comme malgré tout, ma théorie a fait du chemin dans l’esprit de celle-ci, à chaque fois que nous croisons un humain elle lui demande de quoi est-il mort ? Et bien oui en toute logique, comme nous, ces personnes sont des âmes errantes. À vrai dire les gens sont un peu surpris par la question.

Proches de l’eau, nous croisons le fils d’une amie, de l’âge de ma fille. Je n’ai jamais été aussi heureuse de rencontrer une personne connue, je lui fais des grands signes totalement désespérés, ma fille a un peu honte. Bon, s’il est cané lui aussi, il a embarqué ses deux chiens sur le Styx. L’un d’eux s’échappe, on ne pourra pas vraiment discuter. C’est aussi ça le purgatoire, cette distance, inéluctable.

Nous décidons de passer sur la place du marché. Compte tenu de mes cheveux qui tournent à l’orange poivre et sel et de ma dégaine proche de Cro-Magnon, je dis à ma fille que j’espère ne rencontrer personne. En même temps sommes-nous encore vivantes ? Elle me répond que je rencontrerai peut-être l’homme de ma vie et qu’il me trouvera belle parce que je m’assume telle que je suis. Je ne veux pas la contrarier, il y a peu de chances que cela arrive, et sincèrement je ne m’assume pas, je veux retrouver mes coiffeuses préférées et ma couleur végétale de bobo. Visiblement dans ce purgatoire, beaucoup sont décédés avec leur chien ou en train de faire un footing effréné. Certains se mettent même à courir dès qu’ils nous voient. Étrange.

Nous continuons de marcher en bavardant. Nous évitons les âmes errantes qui nous frôlent en suant. Nous nous rapprochons de notre domicile. Un camion de CRS passe dans la rue. Nous espérons être contrôlées, ce serait marrant et cela animerait notre journée, ce serait également un test pour savoir si nous sommes toujours en vie, mais non le camion s’éloigne. Nous rentrons, le chat est toujours là. Vous êtes tous là également, ainsi que Facebook (est-il possible que vous soyez tous morts également ?), Netflix fonctionne, je téléphone à ma mère. Tout semble à sa place. Immuable. Ce que j’imaginais être la mort ne semble être qu’un effet de sidération. Comment ne pas l’être. J’admire les analyses, les textes, les articles, les pensées a priori et a posteriori. Les regrets des uns, les remords des autres, les avertissements, les oiseaux de mauvais augure, les prophètes, les chamanes. Mais aujourd’hui je n’arrive plus à penser. Je suis sidérée. Par tout, mais vraiment tout, les 40 dernières années de politique ultra libérale, la mondialisation, la globalisation, la délocalisation, la société de consommation, le délitement des liens qui fondaient nos sociétés, des savoirs ancestraux, la déconstruction méthodique des services publics, la casse des conquis sociaux, les injustices, les inégalités, l’évasion fiscale, la non répartition des richesses, la domination de classe, l’exploitation des ressources des pays, le colonialisme, le non-respect des territoires et des peuples, des langues, les désordres géopolitiques, les conflits, les guerres, les lobbys, les intérêts financiers, la destruction des éco systèmes, des espèces animales, l’agriculture intensive, les dérèglements climatiques, les politiques véreux, le nouvel ordre mondial, les illuminatis, les reptiliens, les croisades, les Vikings (oui ça c’est parce que je me suis enfilée les cinq saisons d’un coup). Et vous remarquerez que je n’ai pas égrené le terrorisme, le racisme, l’antisémitisme, l’homophobie, la transphobie, le patriarcat, les violences faites aux femmes, faut-il séparer l’homme de l’artiste ? Le nucléaire et Tchernobyl, les maladies exponentielles, les scandales sanitaires, bref il y a tellement encore de sujets à mettre sur la table, bon appétit.

Et maintenant ce virus sorti d’un mauvais film de série B, le défilé des guignols, les mensonges d’État, les luttes d’égo, les virologues, les infectiologues, Pronote de merde, la Chloroquine, les masques faits avec des chaussettes, les applaudissements libérateurs et déculpabilisants à 20h00, l’État sécuritaire et je n’en peux plus, je veux juste aller voir un spectacle tranquille, retrouver ma famille et mes amis, nourrir mon âme, donner des croquettes à mon chat et fêter les 12 ans de ma fille au mois de mai (chacun son individualisme, n’est-ce pas ?).

Je suis donc sidérée par notre immense capacité à foutre en l’air, à l’aune de nos égoïsmes personnels, ce qui pourrait être juste et beau, Quand chacun de nous au final,  dans l’intimité, n’aspire qu’à un peu de paix, de bonheur et d’amour. Sidérée mais pas totalement surprise vous l’aurez compris.

Ceux qui me connaissent savent que je suis passionnée de sciences humaines et particulièrement de psychologie, récemment j’ai relu un ouvrage assez fondateur de la pensée psychanalytique, Au-delà du principe de plaisir.

Ce livre a été écrit en 1920 au lendemain de la première guerre mondiale par Sigmund Freud (oui ça va, ne me cassez pas les noix avec le fait qu’il était misogyne et cocaïnomane, je m’en tape). Pour résumer grossièrement, Freud avait préalablement théorisé l’existence d’un espace de notre esprit qui nous serait inconnu. Il l’avait défini comme « l’inconscient ». Cet inconscient, amas foutraque de nos enfances, de nos souvenirs oubliés, de nos mémoires refoulées, de nos traumas, ne serait accessible qu’au travers des rêves, de l’hypnose, de la cure analytique, des actes manqués, des lapsus, etc. Ainsi, agir  sur l’inconscient ce serait modeler une partie de son esprit et de son psychisme, pour non pas guérir mais se jouer des failles et tenter de faire coïncider si tant est que ce soit possible nos fantasmes avec le réel. Cette conception paraît désuète aujourd’hui mais il faut prendre la mesure de la portée révolutionnaire et visionnaire d’une telle découverte dans une époque nourrie de sorcières et d’exorcismes.

Dès 1915, et à partir d’observations de cas cliniques, de recueils de paroles,  Freud avait émis l’hypothèse que notre vie psychique (conscient et inconscient donc) était traversée par des pulsions[1], en élaborant ce qu’il a nommé la première théorie des pulsions, dont la plus puissante, celle qui nous traverse entièrement, est selon lui, la pulsion de vie, moteur de nos existences  qui tendrait à assouvir nos désirs, sublimer notre réalité et nos êtres profonds.

Il envisage ainsi, en référence à la théorie d’Ewald Hering (physiologiste prussien qui écrivit principalement dans les domaines de la vision des couleurs et de la perception de l'espace), que la pulsion de vie « construit et assimile ».

Donc, pour reprendre le fil, en 1920, dans une Allemagne ravagée par la guerre et la barbarie, témoin de l’impensable et de l’innommable, Freud plonge dans les recoins de l’âme humaine, il ausculte nos ombres et tel un professeur Raoult de première heure, il fait état de ses hypothèses et de ses conclusions empiriques (aucunement fondées sur une approche scientifique, mais sont-elles pour autant invalides ?) sur la nature humaine.

Avorton de cette réalité funèbre, Au-delà du principe de plaisir marque une cassure dans la pensée freudienne, et de façon anticipatoire dans la pensée tout court, il installe ainsi pour la première fois,  les notions aujourd’hui largement vulgarisées de « compulsion de répétition », de « névrose traumatique » et in fine de « pulsion de mort ».

Freud dira ainsi que la pulsion de mort « démolit et désassimile ».

Pour compléter cette réflexion, je vous propose cette citation d’Elise Pestre, chercheuse et psychanalyste extraite de la  préface du livre :

« C’est finalement en se réimprimant de Platon, et de la mythologie avec Eros et Thanatos, qu’il parvient à relier ces deux pulsions. Elles ne se constituent désormais plus comme des entités en opposition l’une avec l’autre, mais à l’inverse s’intriquent, se complètent, leur dialectique étant permanente. On retrouve alors l’énoncé préalable de Freud :

Le but de toute vie est la mort, en remontant en arrière, le non vivant était là avant le vivant »

Alors, me direz-vous, quel rapport avec le Schmilblik ? Je dirais tout mon capitaine, et au risque que l’on me reproche une vision binaire et manichéenne, pour moi Freud avait à ce moment-là extrait la substantifique moelle de nos combats intérieurs.

Cette manie qu’a l’humain de constamment se fourvoyer, rejouer les perpétuels schémas mortifères, de s’empêtrer dans les éternelles pauvres conneries, encore et toujours (compulsion de répétition), cette capacité à s’autodétruire, s’entredévorer, ces poids que nous traînons, nos mémoires traumatiques (le karma diront certains), que nous recyclons de génération en génération, de regrets en aigreur, de mépris en vengeances, « dette » insoluble et immortelle parfois ;  ce combat permanent entre nos pulsions de vie et nos pulsions de mort. Il n’y a qu’à voir les magnifiques élans de solidarité au milieu du chaos, les éclaircies au cœur des ténèbres, le courage des combattants en première ligne, c’est nous ça les humains.

On me demande souvent quel est mon film préféré, je trouve que c’est une question « con » à laquelle je suis incapable de répondre. Autant je me délecte à analyser la société, mes semblables et moi-même (oui oui), autant je n’ai pas un rapport technique, analytique et objectivé à l’Art. Bien souvent je lis ce que l’on me conseille, ce qui m’appelle, je découvre un film au hasard, je ne m’en souviens pas nécessairement.

Ce qui compte c’est que je sois touchée. Et être touchée c’est comme en amour, cela ne se commande pas, cela ne s’explique pas, qu’est-ce qui fait qu’une œuvre nous hante et vibre en nous pendant plusieurs jours, plusieurs années ? Je ne m’avancerai pas dans des analyses cette fois-ci, laissons une part de mystère, il existe bien des boites noires dans la vie.

Donc je n’ai pas de film préféré, mais il y a 6 films qui m’ont profondément marqués, Furie de Fritz Lang, La Fièvre dans le sang d’Elia Kazan avec Natalie Wood et Warren Beatty, Breaking the waves de Lars Von Trier, Légendes d’automne d’Edward Zwick à partir d’une nouvelle de Jim Harrison, Hunger de Steve McQueen et pour finir Snowpiercer de Bong Joon-Ho (ma fille me fait remarquer que j’oublie Les Goonies et Chérie j’ai rétréci les gosses, mais bon cela fera l’objet d’une autre dissertation).

À part le fait qu’ils correspondent chacun à une époque précise de ma vie, ces films n’ont aucun rapport entre eux si ce n’est celui d’explorer l’âme humaine, l’absurdité des normes et du contrôle social, de nos travers et de nos contradictions, parfois le tragique de nos choix, l’éphémère de nos vies, la vacuité de certains de nos combats, la fatalité du destin. Ce ne sont pas les meilleurs films mais ce sont ceux qui m’ont chamboulée, et transformée vraiment, et c’est ce qui compte je crois, comme les chrysalides, nos potentialités de questionnements, de transformation et de mue. C’est peut-être même, la seule chose, qui fait de nous des êtres pensants et éveillés.

Je ne m’attarderai que sur le dernier Snowpiercer que je vous conseille de voir si cela n’est pas déjà fait. Je le résumerai ainsi : apocalypse, lutte des classes, guerre, manipulation, dictature, cannibales, destruction. Espoir (ou pas).

À la fin du film qui se déroule dans un monde post-apocalyptique où toute vie sur terre, ensevelie sous la neige, est impossible, le train dans lequel survivaient  les derniers humains déraille.

A priori donc, l’espèce humaine est foutue, la dernière civilisation est perdue, seuls rescapés deux adolescents l’un paumé, l’autre toxicomane,  uniques survivants de l’accident ; le film se termine sur un plan avec ces deux êtres livrés à eux-mêmes, égarés dans la neige, un ours blanc s’approche, comme parabole d’un probable retour à la sauvagerie ou au monde animal lui-même animé par une force immuable et des lois semblant parfois plus équitables que celles de nos sociétés.

Au-delà de la beauté de l’image froide et glaciale qui ouvre un imaginaire inquiétant, le film est troublant car il dit que nous sommes voués quoi qu’il arrive à disparaitre, à revenir à cet état primaire, où la nature continuerait son évolution sans nous ; qu’il n’existe pas de solution, qu’aucun combat n’est louable.

La phrase de Freud « Le but de toute vie est la mort, en remontant en arrière, le non vivant était là avant le vivant » prend ici une résonnance particulière.

Pourtant le réalisateur choisit de laisser ces jeunes en vie, en proie au pire des destins peut-être, à chacun de présager l’issue, mais ils sont encore là.

Comme dirait je ne sais plus qui, « tant qu’il y a de la vie, il y a de l’espoir ». Et le fait qu’ils soient innocents et porteurs d’avenir (bien que paumés) n’est surement pas un hasard. L’innocence dans ce qu’elle a de pur, de noble, de sincère et dénuée de perversion, semble la seule vertu capable de nous absoudre de nos péchés originels, sans connotation religieuse, mais référence à cette pulsion de mort inextricable et permanente depuis la nuit des temps. En sommes-nous là aujourd’hui ? Perdus dans la neige ? À la croisée des destins ? De quels ravages sommes-nous encore capables ? Qui peut présager des choix que nous ferons individuellement et collectivement ? Qui peut savoir aujourd’hui si le « côté obscur de la force » balayera tout sur son passage, ou si dans une tentative désespérée de renaissance à nous-mêmes, nous réussirons à faire coexister tant bien que mal nos pulsions contraires pour fabriquer un autre monde ?

Le point de bascule est là, imminent, nos choix n’en seront que plus déterminants.

Alors, oui j’ai compris, ma fille et moi ne sommes pas vraiment mortes (je n’ai pas oublié le début de mon texte), nous sommes juste entre parenthèses.

Mais malgré ma sidération, mon anesthésie psychique et ma léthargie intellectuelle, je veux croire que tant que nous sommes debout, dans les tempêtes ou dans le vent, et que subsistent des lumières, l’espoir demeure.

Et ces lumières je les vois, nous les voyons, la tendresse, la présence à soi, au monde et aux autres qui nous sont chers, la profondeur des liens, et bien sur l’Amour comme possible rédempteur des vents contraires qui habitent notre humanité corrompue.

Je vous laisse je retourne voir Chérie, j’ai rétréci les gosses pour la 68ème fois.

 

Delphine R. (et Lila), Bastia, le 9 avril 2020

    

[1] Freud définit la pulsion comme « un concept limite entre le psychique et le somatique, comme le représentant psychique des excitations issues de l’intérieur du corps et parvenant au psychisme, comme une mesure de l’exigence de travail qui est imposée au psychique en conséquence de sa liaison au corporel »

 

     

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