Études corses n° 92
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Études corses n° 92

Études corses n° 92

Juin 2025

16,5 x 24 cm - 272 pages

9782824114859
15,00 €
TTC Livraison sous 1-2 semaines

Revue de l’Association des chercheurs en sciences humaines (domaine corse) 

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Description

Introduction (extraits)

En 1937, le Secrétariat général des fasci italiani all’estero, structure qui regroupait les sections du Parti fasciste hors d’Italie, publiait une petite brochure, destinée aux émigrés italiens et intitulée : Norme di vita fascista all’estero. Dans le but classique de préserver l’identité des « Italiens de l’étranger » (l’italianità), la brochure mettait en évidence le savant dosage entre la nécessaire adhésion aux lois et valeurs du pays d’accueil et la loyauté à la « madre patria ». Rien de nouveau pour un pays d’émigration déjà ancien ? Le régime de Mussolini, tout en reprenant des principes parfois déjà en vigueur depuis le XIXe siècle, est allé beaucoup plus loin dans le contrôle de ses ressortissants, les émigrés devant rester, du moins dans la mesure du possible car la distance érode la capacité d’encadrement, non seulement de bons Italiens, mais surtout de bons Italiens fascistes. […] Même de loin, il fallait donc forger l’« Italien nouveau ». Ainsi, malgré les efforts de Rome, l’italianità, ne s’est pas confondue avec l’adhésion au fascisme.

C’est cette présence du fascisme au quotidien dans la vie des communautés italiennes émigrées que ce dossier entend analyser, reprenant l’essentiel des contributions présentées lors d’un colloque tenu à Bastia les 27 et 28 octobre 2023, sous l’égide du programme EUROFA (« Europe et fascisme italien : transnationalisme, circulations et réseaux (1922-1943) »), financé par l’Agence nationale de la recherche (ANR). Son objectif consiste en particulier à retracer, à partir des représentants, relais – dont furent une partie des émigrés – et passeurs, la présence et les réseaux du fascisme italien en Europe.

[…] En proposant un panorama méditerranéen, un espace si stratégique pour le fascisme, ce dossier entend ainsi redécouvrir, à partir d’exemples précis, comment le fascisme s’est inséré dans les contextes nationaux pour nourrir des mouvements migratoires – ceux des « commis-voyageurs » du régime – et tenter de mettre la main sur la masse d’Italiens pour lesquels le fascisme ne fut pas un repoussoir. À l’heure où l’approche du fascisme, comme celle de l’antifascisme, se renouvelle pour devenir de plus en plus globale, c’est autour de trois questionnements précis que s’oriente ce dossier : (1) le rapport – ou d’ailleurs l’absence de rapport ainsi que les stratégies d’évitement – quotidien des Italiens avec le fascisme. […] (2) Le rôle ainsi que le profil des actrices et acteurs, afin d’éviter toute vision surplombante ou désincarnée. (3) Enfin, le caractère spécifique ou ordinaire de ces rapports dans les différents contextes où ils se donnaient à voir.

[…] les diverses études qui composent ce numéro thématique entendent montrer comment se vivait le fascisme hors de la péninsule. […] On a beaucoup travaillé sur les ethnoterritoires que représentaient les « Little Italies ». Des enclaves de même nature, plus politiques, quadrillées par le fascisme, ont-elles existé de semblable manière ? Quel type d'adhésion au fascisme existait à l'étranger ? A-t-elle été similaire à celle de la péninsule, a-t-elle suivi la même chronologie ? Y avait-il des terres de mission privilégiées ou tous les territoires étaient-ils concernés par la propagande fasciste ? Quels éléments de l’idéologie du régime (culte du « Duce », aventure coloniale…) pénétraient-ils le mieux à l’extérieur des frontières ? Le fascisme parvint-il à transformer, in fine, le sentiment national italien ?

Autant de questions, non limitatives, qu’abordent les auteurs en variant espaces et approches. Des études monographiques portant sur des espaces précis (Patras, la Corse, la colonie libyenne…) étudient ainsi la tension entre italianité et fascisation, une question que l’on retrouve aussi à travers des supports écrits qui font l’objet d’analyses détaillées (Critica fascista, Vita italiana, L’Azione coloniale, L’Idea Corsa…). Tout cela démontre l’omniprésence de l’enjeu pour l’Italie fasciste. La fascisation se pensait et se vivait aussi sur les bancs de l’école ou lors des pratiques sportives, dont on sait à quel point le fascisme pouvait y voir des lieux et occasions d’influence. Au prisme des Italiennes et Italiens qui vivaient hors de leurs frontières, de cette « Italia fuori d’Italia », se dévoile un autre aspect d’un fascisme d’exportation (ou transnational) auquel le régime fit le choix de se convertir pour se projeter dans un monde où les modèles politiques se concurrençaient. Encore fallait-il commencer par convaincre les siens.

Stéfanie Prezioso,
Jean-Paul Pellegrinetti,
Jérémy Guedj

Sommaire

Introduction

Première partie
L’immigration italienne en Méditerranée à travers la pensée et le discours fascistes

Un esilio in patria. L’engagement irrédentiste et fasciste d’Anton Francesco Filippini à travers L’Idea Còrsa – Sylvain Gregori

« Émigrer le moins possible ». Notes sur l’émigration italienne dans la presse périodique fasciste – Marco Cini

La Corse et Malte dans les pages d’Il Legionario – Deborah Paci

Les Italiens en Méditerranée dans L’Azione coloniale, revue officielle fasciste des années 1930 – Nicola Labanca

Deuxième partie
« Everyday fascism ». Fasciser l’émigration par le bas

Les écoles italiennes à l’étranger et la fascisation du quotidien : programmes et pratiques – Martino Oppizzi

Réalités et représentations des pratiques sportives à l’étranger et dans les colonies sous le fascisme italien – Clément Luy

La Libye est-elle « all’estero» ? Convergences et différences entre italianisation et fascisation de la Libye
sous la colonisation italienne – François Dumasy

Les Italiens et le fascisme au Maroc dans l’entre-deux-guerres : une imprégnation superficielle au sein d’une communauté tardive ? – Jérémy Guedj

Tu sei Italiano. Devi restare Italiano. Le fascisme et la communauté italienne en Corse, 1922-1943– Jean-Paul Pellegrinetti

Les Italiens de Patras pendant l’ère fasciste 1923-1945 – Anastasia Koukouna

Varia

Les auteurs

Stéfanie Prezioso, professeure d’histoire contemporaine, Université de Lausanne.

Sylvain Gregori, conservateur en chef du musée de Bastia et du musée de la Résistance corse, docteur en histoire, chercheur associé au CMMC

Marco Cini, professore associato di storia contemporanea. Dipartimento di scienze politiche, Università di Pisa


Deborah Paci, professeure associée, Università degli Studi di Modena e Reggio Emilia

Nicola Labanca, professeur des universités en histoire contemporaine, Università di Siena

Martino Oppizzi, membre de l’École française de Rome

Clément Luy, ATER, laboratoire CETAPS, Université de Rouen-Normandie, doctorant, laboratoire Triangle, ENS de Lyon.

François Dumasy, maître de conférences, Institut d’études politiques d’Aix-en-Provence

Jérémy Guedj, maître de conférences en histoire contemporaine, Université Côte d’Azur-CMMC

Jean-Paul Pellegrinetti, professeur d’histoire contemporaine, Université Côte d’Azur-CMMC

Anastasia Koukouna, post-doctorante, Université de Fribourg

Détails du produit

Parution
Albiana - ACSH 2025
Format
16,5 x 24 cm
Nombre de pages
272

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