Jocelyne Normand - Presque une forêt en mon jardin. "Arbres" 2ème partie

Presque une forêt en mon jardin. « Arbres » 2ème partie

 

 

Comme chaque jour, me revoilà dans mon jardin d'un demi-hectare, au milieu de très grands arbres spectaculaires. Je franchis une sorte de porte, entre un gros et haut buisson d'hortensias à dominante bleue à gauche et un gros et haut buisson de chèvrefeuille à droite. On dirait qu'il y a une sorte de mimétisme avec « l'ancêtre » (le chêne sessile multi-séculaire) qu'on laisse sur la gauche.. A qui serait le plus haut !

Et là, on découvre le noyer, très imposant lui aussi, avec ses branches qui s'étalent jusqu'à terre. En cette saison, en ce moment, il est chargé de noix qui s'écrasent sur le sol en partie encore dans leur bogue. On se tache les mains à les ramasser (le brou de noix). Mais comme c'est bon les noix fraîches ! J'en ai apporté à mes voisins (un échange puisque je croule sous les figues violettes de leur arbre qui n'a jamais produit autant, la chaleur caniculaire que nous avons connue doit en être la cause).

Il me dit, Roger, le voisin : « Il doit avoir un certain âge le noyer car c'est un arbre réputé pour produire très très longtemps après sa plantation ». Bien vu Roger. Ce noyer a certainement l'âge de ses voisins de parcelle, mes deux pommiers. Pascal, qui restaure les vieux vergers, a estimé que mes deux pommiers ont au moins 60 ans. C'est donc la dame citadine ayant crée ce jardin il y a quelque soixante-dix ans, qui les a plantés. Elle a planté aussi le noyer qui produit autant de noix. Mes deux pommiers donnent des pommes à couteau (et non des pommes à cidre), l'un des reines de reinettes et l'autre des reinettes du Canada. Il y avait un troisième pommier un peu plus loin qui avait dû être planté une dizaine d'années avant les deux autres. Il était spectaculaire et donnait des pommes grosses comme des pamplemousses, délicieuses. Personne par ici n'a réussi à savoir quelle était la variété de ces pommes, une variété très ancienne sans doute. Malheureusement, ce vieil arbre a terminé sa vie il y a sept ans environ. Bernard, un autre voisin, a eu le temps de prélever un greffon et il a ainsi chez lui un pommier greffé issu du mien qui produit les mêmes grosses pommes savoureuses.

C'est mon regret, j'aurais dû demander à Bernard d'en greffer un chez moi aussi, en souvenir de mon vieil arbre que j'aimais tant. Et auprès duquel j'ai vécu pendant au moins sept ans.

Et voilà la prairie. Il y a trois jumeaux de l'ancêtre, le chêne sessile multi séculaire. Le quatuor (ou les quadruplés) faisait partie d'une haie bocagère avant le remembrement. En enfilade il y aussi est-ce un charme ou un hêtre, au tronc aussi impressionnant que celui de ses quatre congénères chênes... Et puis un douglas de la même époque, les années 50.

Trois peupliers avaient les pieds dans l'eau car le bas de la prairie est une zone humide , entre deux fontaines à droite et un ancien lavoir à gauche. Un peuplier s'est écroulé il y a quelques années. Les deux autres, très hauts, résistent encore.

En plus, moi, en arrivant dans ce jardin-forêt, je ne savais pas que certaines d'espèces d'arbres peuvent pousser très vite (c'est moins vrai pour les chênes qui prennent leur temps mais pour vivre très très longtemps...). Donc, dans la prairie, j'ai planté des bouleaux et un eucalyptus, rapporté tout petit en pot depuis Opio dans les Alpes Maritimes. Eh bien, il est désormais gigantesque. Brigitte, une voisine, est venue le voir très étonnée qu'il n'ait été planté là qu'il n'y a qu'une dizaine d'années. Elle, vient juste d'en planter un chez elle.

Brigitte m'a ensuite accompagnée dans la partie « maison ruinée », la « ruine » où les frênes de la première période de ce jardin sont hauts eux aussi. En plus, moi, j'ai planté des bambous, gigantesques aujourd'hui et les mimosas font une forêt. J'en avais planté un acheté dans une jardinerie (donc très « poussé » côté engrais et autres). Malheureusement, il a gelè. J'en ai découvert un autre (petit) sauvage, à l'extérieur d'une maison un peu plus bas. Il n'a pas gelé et désormais, c'est un arbre de trois troncs entrelacés très vigoureux et très hauts, sa plantation datant, selon moi, de six ans pas plus. Incroyable.

J'ai crée ici un refuge LPO. Il y a beaucoup d'oiseaux. Comme l'automne est là, dans tous ces arbres hauts les chouettes effraies et chevêches vont commencer leur conversation la nuit. Un cri très pur.

Il y a aussi un hérisson, un écureuil, une fouine et une hermine (très rare celle-ci), plus forcément pas mal d'insectes.

« Les arbres m'ont transmis l'envie d'éternité. Ils m'ont donné comme pouvoirs la patience, la sagesse et une idée de l'immortalité », c'est d'Alain Baraton sur la quatrième de couverture du « Dictionnaire amoureux des arbres ». A l'intérieur du bouquin, il cite : Jean Giono : « Il y a dans la forêt des bruits qui ressemblent à des paroles » et Gilles Vigneault : « Un livre, c'est un arbre qui cherche à dire à toute la forêt qu'il y a une vie... après la vie ».

 

J'adhère à ces propos avec bonheur évidemment.

 

Jocelyne Normand

 

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