"Autonomia, un chjam'è rispondi" - Tonì Casalonga et Wanda Mastor dans la revue Robba

En mars 2022, l'actuel ministre de l'Intérieur s'est déclaré prêt à discuter d'un statut d'autonomie avec les représentants de la Corse. Toutefois, bien que présente dans les débats depuis les années 1960, l'idée d'autonomie est loin d'être facilement saisissable - peut-être parce qu'elle est trop lointaine des canons de l’État unitaire français - et elle fait l'objet de conceptions très diverses. Auteure d'un rapport remarqué à la demande de la collectivité de Corse, la constitutionnaliste Wanda Mastor échange ici avec Tonì Casalonga, artiste et acteur engagé dans la vie publique.

Tonì Casalonga : J’ai fait partie du public qui assistait, l’autre jour à Paris au Salon des éditeurs corses, à votre présentation des travaux que vous menez depuis longtemps déjà au sujet de l’autonomie. Sans doute parce que ma formation et mes activités ne m’ont en rien préparé à assister à un exposé de droit constitutionnel, j’en suis sorti plein de stupeur.
Et une fois revenu dans le calme de la Balagne automnale, je me suis interrogé sur l’étrange et puissante résonance de ce mot qui depuis longtemps accompagne mon parcours de citoyen, comme celui de beaucoup de Corses. Oui, ce mot m’accompagne et me déchire tout à la fois, car tantôt il me donne l’impression de pouvoir conquérir une part légitime de liberté, tantôt il m’accable par l’évidence de l’acceptation d’une impossible indépendance. Or, j’ai ressenti en vous entendant comme une révélation, ce qui m’avait échappé auparavant : l’autonomie, ce serait donc une indépendance, mais partagée et solidaire ?

Wanda MastorVotre question est la preuve de l’intérêt de délivrer des conférences. Elles ne sont pas des monologues à visées égotique et/ou commerciale, mais le lieu d’échanges et de transmission. Quand on est un professionnel de la pédagogie, on essaie de la traîner partout avec soi. Et ces lieux d’échanges sont aussi riches pour l’auditoire que pour les conférenciers : j’apprends beaucoup à chaque fois, me nourris des réflexions, commentaires et questions suscités par ma manière de présenter l’autonomie, qui en est le sujet principal en ce moment. Votre question en est un parfait exemple : jamais je n’avais envisagé l’autonomie comme une « indépendance partagée et solidaire ». La juriste vous répond que la définition n’est pas « celle-ci », la citoyenne corse qui admire et a peut-être la faiblesse de comprendre votre œuvre vous remercie… car je crois saisir le sens de votre propos et suis touchée que vous l’ayez formulé telle une « révélation ».
Un État central qui offre l’autonomie à une terre et son peuple respecte sa part de liberté. L’autonomie au sein de la République n’est pas, et peut ne jamais devenir indépendance de ladite terre. Mais la percevoir par le prisme des compétences exclusives, de l’acceptation de ses particularismes, de son identité, de la co-officialité de sa langue primaire, peut vous ôter la peur de « l’accablement » que vous évoquez. Mais vous avez aussi une part de responsabilité : les vrais acteurs de l’autonomie de la Corse ne sont pas les élus ou la constitutionnaliste que je suis. Sò quelli chì travaglianu a terra, chì amparanu è cantanu in corsu, chì allevanu e nostre pecure, chì pruducenu u vinu, i piscadori, pastori, artisti… Tutti quelli chì travaglianu incù e mani, scrivite u rumanzu di a nostra libertà. Vous comprenez de quel type de responsabilité je veux parler ?
 
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