Les rêves secrets se réalisent parfois. Il suffit d’y penser très fort. Une nouvelle de Pierre-Louis Fondacci.
Un pouvoir inattendu
Le 24 avril 2036, la sonnerie retentit dans la salle 107. Une salle sans professeur. Le seul professeur est un hologramme mobile. Un vrai psychopathe. Il nous observe à chaque contrôle, et le premier qui triche, le prof divulgue une photo ou un dossier très gênant sur l'élève.
Dans la classe, il n'y a même pas de fenêtre, juste des trous dans les murs et des lumières qui fonctionnent une fois sur deux. Le bois des chaises est vermoulu, les tables ont les pieds tordus et des trous dans le plateau. Dans chaque table est inséré un PC sans rebord avec clavier intégré. Le plus technologique sont les enceintes, elles sont incrustées dans les murs mais elles aussi sont délabrées. Même le carrelage est cassé. Il y a des rats.
Après la récréation, j'ai remarqué du sable sur ma chaise mais je ne m'en suis pas beaucoup préoccupé, ce n'est pas rare que je retrouve du sable sur ma chaise vu l'état des murs. Soudain, un bruit sourd retentit. C'est souvent qu'il y a un bruit fort mais cette fois-ci c'était différent. Je me tourne donc brusquement et là, à ma grande surprise, je m'aperçois que le mur du CDI est par terre ! Dans la classe, nous sommes paniqués, tout le monde crie, il y a du sang partout. C'est terrible ! Le CDI est vide, il n'y a plus personne à part de la poussière et des livres indestructibles.
Quand je me tourne, je remarque que la fissure du mur juste en face de moi est en train de s'agrandir. Des pierres s'en échappent. Pendant un bref moment, je prie pour que mon professeur soit assommé et en un claquement de doigt, une pierre de 30 kg lui tombe sur le crâne. Je suis choqué ! C'est comme si je venais de découvrir un super pouvoir ! J'ai l'impression que si je pense très fort à une chose, elle se réalise.
À ce moment, Louis, mon pire ennemi s'approche du professeur pour s'assurer qu'il est encore en vie. Je pense alors très fort que le mur peut s'écrouler et là, dans le fracas et la poussière le mur devant lequel se trouvait Louis lui tombe dessus. Encore sous le choc, j'entends un craquement et le sol derrière moi s'effondre. Le stress est à son comble !
Pour le coup, je me dis que j'ai de la chance de ne pas être blessé ou même touché. Je suis pétrifié. Le sol continue de se dérober sous nos pieds et tous mes camarades tombent un à un dans le trou béant dont on ne voit même pas le fond.
Cette fois c'est à mon tour de tomber. J'ai déjà commencé ma chute quand je me souviens de mon super pouvoir. Je me mets donc à penser très fort que je reste en l'air et, en moins d'une fraction de seconde, je me fige dans les airs. Tel un glaçon dans un congélateur, je ne peux plus bouger un seul membre ni même la tête. Le temps me parait interminable quand soudain une force imaginaire m'emporte dans un endroit inconnu. Le sol est rempli de débris, de bouts de murs et de robots démembrés. Un grand couloir s'ouvre devant moi... il fait tout noir... Cela fait maintenant trente minutes que je marche quand deux portes s'ouvrent devant moi. Une à gauche, une à droite. J'hésite pendant au moins cinq minutes. Je décide de prendre la porte de gauche. Il y a des cages avec des singes enfermés. Je ressens un frisson me parcourir en long, en large et en travers. C'est la peur. Je vois tous ces singes souffrir, c'est terrible.
Je me tourne et distingue sur la droite un grand bureau avec des hologrammes qui affichent des plans du collège. Je m'approche pour essayer de savoir où je suis. Je ne comprends pas tout de suite mais je réalise qu'en réalité je suis dans une aile secrète du collège. Tout un espace inconnu des élèves. Je peux lire sur le plan qu'il existe un garage avec des hélicoptères Puma, des McLaren 720 S et plein d'autres. Je ne comprends pas pourquoi un tel dispositif pour un collège. Pourquoi toutes ces informations sur ce mur ? Qu'y a t-il dans les ordinateurs ? Que contiennent ces papiers enfermés dans des pochettes en fer blindées ? Je suis perdu dans mes pensées quand soudain une main me tapote l'épaule.
L'homme qui se dresse derrière moi parle d'une voix déformée. J'ai du mal à comprendre ce qu'il dit mais ses propos semblent incohérents. Je distingue les mots « collège », « catastrophe », « professeur »... J'ai terriblement peur, ma vue se brouille, je suis sur le point de tomber dans les pommes quand l'homme me secoue. J'ouvre alors les yeux. Je ne comprends pas que fait ma mère ici dans ce décor. Je suis dans ma chambre. Confortablement installé dans mon lit, trempé de sueur. Ma mère me crie de me dépêcher parce que je vais être en retard au collège.
Mon esprit est encore embrouillé.
Tout ceci n'était alors qu'un rêve ? C'est impossible ! Cela me paraît encore si réel ! Et mon super pouvoir était imaginaire aussi ? Je n'y crois pas une seconde !
Je me concentre alors comme je ne l'ai jamais fait et souhaite un énorme petit-déjeuner composé de bacon avec du pain grillé, des œufs brouillés et un bon jus de pomme. J'ouvre les yeux doucement et là... un magnifique plateau, comme je l'avais imaginé se trouve posé au pied du lit.
Je n'en reviens pas, mon pouvoir est donc réel ! Je referme donc les yeux et souhaite d'avoir un 20/20 à ma production écrite. Affaire à suivre...
Corte au temps des hordes
En attendant le second tome du roman d’Anouk Langaney qui arrivera bientôt (Le Temps des hordes – Soupçons), les élèves de troisième du Collège Pasquale Paoli de Corte se sont mis au travail. Ils ont imaginé, chacun de leur côté ou en petits groupes, leur propre suite en répondant à ces questions : « À quoi ressemblera ton lieu de vie en 2036… quelle catastrophe pourrait s’y produire ? Comment t’en sortir (avec le super-pouvoir de ton choix !?). À toi d’écrire ».
22 nouvelles ont été écrites dans le cadre du projet littéraire Corte au temps des hordes, dont celle-ci, par des élèves de la 3e Rouge.
Avec la complicité de Stéphanie Fede Vincensini et d’Anouk Langaney.
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