Quatrième de couverture
Tout commence par l’absence de Lucien Federini (1803-1865) au mariage de son fils aîné. La raison ? Une tentative d’assassinat. Ce qui est intéressant dans cette histoire, c’est moins le geste criminel, assez banal dans une île alors marquée par la violence, que la personnalité de la victime. Il s’agit du gendre de l’ancien maire, membre du parti adverse. Or, le coup de fusil de Lucien ne relève pas du règlement de compte partisan. Les élections municipales de juillet 1848 viennent juste de porter au pouvoir son clan politique. Mieux, le nouvel édile est allié à l’une des parentèles les plus puissantes de Corse : les Sebastiani.
Dans un tel contexte, pourquoi tirer sur un adversaire électoralement défait ? Cet acte n’a aucun sens, il paraît même absurde. Et pourtant, ce n’est pas un « coup de folie ». Ce que donne à voir le geste de ce paysan sans histoire, veuf et père de trois enfants, c’est en fait un miroir où se réfracte tout un univers social et politique, lequel ne se réduit pas à sa seule communauté villageoise (Borgo), mais embrasse plus largement la civilisation agropastorale de l’époque, notamment dans ses relations avec l’État. À travers l’autopsie du coup de fusil de Lucien, c’est le statut de la violence en Corse en tant que « spécificité culturelle » qui se trouve interrogé.
L'autrice
Docteure en sociologie, Fabienne Federini s’intéresse aux questions de mobilisation et de violence politiques, y compris en régime démocratique. À titre principal, elle a publié : Penser l’oubli après 1945. Voies du silence, voix de l’absence, 2015 ; Écrire ou combattre. Des intellectuels prennent les armes (1942-1944), 2006 ; L’Abolition de l’esclavage de 1848. Une lecture de Victor Schoelcher, 1998 ; La France d’Outre-Mer. Critique d’une volonté française, 1996.