Extrait
JE VOIS UN ANGE
On a besoin de quelqu’un à qui parler quand l’univers entier s’efforce de vous écraser, et c’est d’abord pour ça que je suis allé vers Sarah.
Elle était mignonne, sans plus. Au bord de l’insignifiance.
Mais très vite, je suis devenu accro à son sourire.
Je m’imaginais plus vivre sans elle.
On était étudiants. On aimait bien baiser entre midi et deux, dans sa chambre de cité, juste avant de partir nous emmerder en cours.
Une fois, on a changé nos plans, à cause d’une grève à la fac. On a fait ça plus tard dans l’après-midi.
Le temps était pourri, je me rappelle.
Il tombait une averse et elle a eu un orgasme. Elle s’est accrochée à moi. On aurait dit qu’elle se noyait. Elle a poussé un cri étrange, pathétique. Genre une petite fille qui se brûle. Et ça a été tout. Puis elle m’a murmuré à l’oreille : “ Je vois un ange... ” Ensuite, elle s’est endormie, avec un sourire magnifique sur son visage paisible.
Je me suis allongé à côté d’elle, dans la pénombre de la chambre. J’ai dormi, moi aussi.
J’ai fait un rêve.
J’étais dans une rue déserte, sous un soleil de plomb. Je marchais la tête baissée. Soudain, une cascade rouge éclaboussait mes chaussures. J’étais étonné. Puis je réalisais que c’était du sang, et que ce sang venait de mon nez.
Je me suis réveillé en sueur. Sarah dormait tranquillement. Toujours souriante.
Je me suis rendormi, bercé par le chant de la pluie.